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UN DIVORCE

Il avait jeté ces derniers mots en se tournant un peu du côté de mademoiselle Sargeaz :

— Vous ne pouvez pas me résister ; vous devez m’obéir ; vous êtes tout à fait en mon pouvoir.

Il avait le ton amer, la bouche ironique ; ses yeux étincelaient.

— Il a raison, dit Mathilde d’un ton âpre. La loi te livre à lui tout entière, corps et âme, à la réserve de tes biens. Les biens seuls exceptés, ma chère ! médite bien cela, et respecte la loi et les législateurs.

Il y eut un silence, pendant lequel M. Desfayes acheva son repas à la hâte. Puis il se leva pour sortir. Claire se leva aussi et allant se placer à la porte, au-devant de lui :

— Ferdinand, dit-elle avec une douceur solennelle, qu’elle n’avait jamais eue encore ; je vous en prie, Ferdinand, réfléchissez. Quel intérêt avez-vous à me faire du mal, à moi la mère de vos enfants ? Je ne vous demande plus de m’aimer, je vous demande seulement un peu de paix. Il y a pourtant certaines choses que je ne puis souffrir ; je ne puis pas recevoir chez moi, pour aide et servante, une créature de madame Fonjallaz.

— Qui vous a parlé de madame Fonjallaz ? s’écria-t-il furieux. Que signifient ces propos ? Vous êtes bien effrontée de me jeter toujours cette accusation à la face. Assez ! je veux être maître chez moi. Vous recevrez cette fille, puisque c’est une chose faite, un peu trop promptement peut-être, mais je n’y puis revenir. Si vous en êtes mécontente plus tard, vous la renverrez, et vous prendrez à sa place une soubrette recommandée par M. Camille.

— Encore ! s’écria Claire.

Alors, se retirant de la porte, elle le laissa partir ; puis elle tomba sur une chaise, les bras abattus, désespérée.

— Faisons-nous les malles ? demanda Mathilde.