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UN DIVORCE

que cette pauvre enfant est angoissée de tous les mensonges qu’il a dits.

— Ah ! maman, s’écria la jeune femme, puisqu’il ment, je suis perdue ! Dire du mal d’une femme, vous savez bien que cela se croit toujours. Oui, répéta-t-elle avec des regards désespérés, puisqu’il ment, je suis perdue !

On essaya vainement de la rassurer ; elle répétait comme réponse à tout :

— Non, on le croira ; les juges le croiront aussi…

Alors, sa voix devenait étranglée, elle cachait sa tête dans ses mains. On devina que les enfants étaient l’objet de ses craintes.

— Elle n’a pas si grand tort, disait M. Grandvaux, le soir, à sa femme ; cet imbécile de Pitou, notre parent, faisait une mine toute chose, pendant le discours de Desfayes, et même au sortir de l’audience, il m’a dit : — Eh ! mon Père ! les vilaines affaires ! Ma nièce aurait peut-être mieux fait de rester tranquille. Il y a toujours des torts des deux côtés. — Moi, je n’en sais rien ; mais il n’y avait pas à choisir ; il fallait sauver le bien, et je l’ai fait.

Claire, à partir de ce jour, vécut dans une attente mortelle. Presque toujours absorbée et silencieuse, un bruit inattendu la faisait tressaillir et lui arrachait des cris. Elle embrassait quelquefois ses enfants avec une sorte de frénésie ; le petit Fernand la contemplait de ses grands yeux étonnés, et, subissant l’influence de l’état de sa mère, qu’il percevait secrètement par tous les organes de sa sensibilité si vive et si délicate, il ressentit un malaise qui affecta à la fois son caractère et sa santé. Mais plus il exigeait de soins et de complaisances, plus sa mère, avec une ardeur sombre et passionnée, les lui prodiguait.

La permission de citer avait été accordée à madame