Page:Léo Taxil - À bas la calotte.pdf/25

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
— 27 —

Qu’ont-ils à faire là-bas, tous ces individus à robe noire ou violette ? Ne peuvent-ils pas laisser les gens tranquilles ? Qu’importe à Dieu — si Dieu existe — qu’on l’adore sous le nom de Jésus, de Jéhovah, de Jupiter ou de Bouddha, pourvu que ceux qui prennent la peine de l’adorer se conduisent sur la terre honnêtement ! Pourquoi vouloir à toute force que les Chinois et les Japonais avalent des hosties au lieu de brûler du papier doré devant leurs statues ?

Voyons, je serais bien curieux de savoir ce que feraient nos prêtres de la secte catholique si on se conduisait à l’égard de leurs ouailles comme ils se conduisent envers ceux qu’ils flétrissent du nom d’idolâtres.

Je suppose que, demain, une bande de mandarins débarque en France ; je suppose que ces ministres de Bouddha entrent impétueusement dans une église chrétienne au moment de la messe, qu’ils escaladent l’autel, qu’ils brisent le tabernacle, qu’ils renversent les croix, les statues de madones et de saints, et qu’ils s’écrient :

« Peuple d’infidèles, écoute-nous. Nous venons te prêcher — la vraie religion. Depuis des siècles, tu croupis dans les ténèbres de l’idolâtrie catholique. Tu vois que tes saints et ton Dieu ne valent rien ; ce sont de faux dieux ; nous les avons brisés devant toi, et s’ils n’ont pas manifesté leur puissance en nous foudroyant, c’est que leur puissance n’existe pas. Peuple d’infidèles, apprends que le dieu vrai, c’est Bouddha !… Bouddha qui s’est incarné dans Brahma et dans Vichnou !… Lui seul est grand, lui seul existe, lui seul a créé le monde… Peuple d’infidèles, abandonne ta religion et prends la nôtre… Veux-tu, pour te convaincre, une nouvelle preuve de la fausseté de ton dieu ?… Tiens ! regarde ces hosties que tes prêtres te donnent comme contenant la divinité elle-même… Vois ce que nous en faisons, nous les jetons au vent, nous les foulons aux pieds… Ce ne sont que des fétiches… Ils ne peuvent rien contre nous qui sommes les envoyés du vrai Dieu… Comprends, peuple, que jusqu’à présent tu as été dans l’erreur et que tu ne t’es prosterné que devant de vaines idoles. »

Supposons, dis-je, qu’une bande de mandarins se conduise de la sorte. Il est absolument certain que bedeaux, marguilliers, sacristains et sonneurs de cloches se joindraient