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LA VIE DE JÉSUS

chantres. Le célébrant récitait des invocations, et tous les fidèles répondaient en chœur : Amen.

Après quoi, venaient une série de dix-huit bénédictions et le sermon, qui était le morceau de résistance de la cérémonie. Généralement, c’était le Rabbi qui en faisait les frais ; mais quand un juif étranger, réputé savant, paraissait dans l’assemblée, vite on le conduisait à l’estrade pour entendre son speech.

Ce fut un jour de grande cérémonie religieuse que Jésus arriva à Nazareth. Ses disciples se rendirent avant lui à la synagogue, pour lui préparer son entrée en scène. Ils s’étaient mêlés à la foule.

L’Oint avait quelque peu changé son costume. Les commentateurs catholiques nous disent qu’il avait ce jour-là un grand manteau l’enveloppant et qu’il s’était mis sur la tête un voile serré autour du front par une cordelette à la mode des Bédouins. De sa tenue ordinaire, il n’avait conservé que sa tunique.

Par exemple, cette tunique mérite une mention expresse.

Elle était sans couture. Entendez-vous ? sans aucune couture ! Et elle lui servait depuis sa naissance !!!

Cette tunique modèle était d’une étoffe particulière, qui s’agrandissait au fur et à mesure des développements du corps de Jésus. Ses membres augmentaient de grandeur, de force, ils pouvaient se raidir même, jamais la tunique ne craquait. Quand il prenait du ventre, élargissement de la tunique ; quand il maigrissait, rétrécissement. Cette tunique merveilleuse, Jésus l’a gardée jusqu’à sa mort. Nous verrons à ce moment-là ce qu’elle est devenue ; car ce vêtement a sa légende.

Le bon ami de la Samaritaine se présenta donc brusquement au milieu de la synagogue de Nazareth. Les disciples, qui avaient le mot, de s’écrier tous ensemble :

— Un docteur ! un docteur de Jérusalem ! À la tribune ! à la tribune !

Comme s’il avait été demandé par l’unanimité de l’assistance, Jésus s’élança sur l’estrade et saisit prestement la longue bande de papyrus que le chazzan tenait roulée sur un bâton d’ivoire et sur laquelle étaient inscrits les textes sacrés. Aussitôt, il développa l’inscription et se mit à lire ou à faire semblant de lire :

— Prophétie d’Isaïe !… Attention !… L’esprit du Seigneur est sur moi ; c’est pourquoi il m’a consacré par son onction, il m’a envoyé pour évangéliser les pauvres, guérir les cœurs affligés, annoncer aux captifs leur délivrance et aux aveugles le recouvrement de leur vue, pour renvoyer libres ceux qui sont brisés sous leurs fers, pour publier l’an de pardon du Seigneur et le jour de sa justice !

Il est facile de comprendre quel parti le malin compère se proposait de tirer de sa citation si adroitement choisie.

Il referma le livre, le rendit au ministre, et s’assit.