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Page:Léo Taxil - La Vie de Jésus.djvu/156

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LA VIE DE JÉSUS

proverbe qui dit : « Jeux de mains, jeux de vilains », ensuite parce que, les particuliers au tempérament pacifique seront appelés les enfants de Dieu, et c’est un titre, ça !… Heureux enfin ceux qui sont tarabustés par des tribunaux injustes, car ils auront un dédommagement à ces tracasseries en entrant avec les imbéciles dans le royaume des cieux !

Les apôtres étaient tous contents de l’entendre blaguer ainsi. Jésus avait eu soin de ne pas s’entourer d’autres auditeurs qu’eux. De la sorte, ils avaient la primeur de ce beau sermon que le Verbe devait rééditer dans la suite pour l’usage du vulgaire.

Et notez que ce n’était pas fini.

S’adressant aux apôtres d’une façon toute particulière, il leur dit :

— Mes paroles sont pour les pauvres d’esprit en général et pour vous en particulier. Sous le rapport de l’intelligence, vous n’êtes pas millionnaires, et c’est une rude chance pour vous ! Vous êtes aussi des veinards en ce que vous aurez tous les autres hommes contre vous : on vous turlupinera à plaisir, on dira de vous un mal du diable, on vous jouera toutes sortes de vilains tours, les tribunaux vous en feront voir de grises. Mais réjouissez-vous à cause de cela ; car cela établira une similitude entre vous et les prophètes. Vous savez ce qui est arrivé aux prophètes ? Leurs contemporains se sont toujours appliqué à leur faire une existence de ronces et d’épines : on les a battu de verges, traînés par les cheveux, jetés dans des fosses pleines d’animaux féroces, sciés en deux même ! Eh bien ! tout cela vous attend, c’est là le brillant avenir qui vous est réservé. Savourez-le d’avance, mes amis ; c’est un grand bonheur pour vous, que vous soyez destinés à toutes ces persécutions !…

Nos bonshommes esquissaient une grimace qui ne signifiait pas précisément qu’ils savouraient ce genre d’avenir.

Jésus reprit :

— Faut pas vous chagriner, les camarades. Il est indispensable que les choses se passent ainsi. C’est écrit ; nous ne pouvons rien y changer, ni vous, ni moi. Vous êtes le sel de la terre ; si le sel perd sa force, avec quoi le salera-t-on ?

Les apôtres se regardèrent étonnés. Ils ne comprenaient pas.

— En vérité, en vérité, je vous le dis, il ne faut pas que le sel perde sa force ; sans quoi on ne trouverait plus rien pour le saler. Du sel qui ne serait pas salé, voyez-vous, cela serait tout au plus bon à jeter aux balayures !

Je n’invente rien. Ces paroles sont de Jésus-Christ. Lisez saint Matthieu, chapitre V.

— Vous êtes le sel, recommença le Verbe ; mais vous êtes en même temps la lumière du monde. Quand une ville est située au sommet d’une montagne, ce n’est pas comme si elle était au fond d’un vallon, hein ? Au fond d’un vallon, on ne la voit pas,