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LA VIE DE JÉSUS

Son avis refroidit donc singulièrement le zèle des adversaires de la malheureuse. Scribes et pharisiens gardèrent le silence ; leurs mains s’abaissèrent et laissèrent tomber sur le sol les pierres qu’elles tenaient. Légèrement confus de cette solution à laquelle ils ne s’attendaient pas, ils se retirèrent les uns après les autres, d’abord les vieux paillards qui n’avaient pas été les moins acharnés, puis les jeunes débauchés, race cruelle.

La femme adultère resta seule avec Jésus, nous dit l’Évangile. Que se dirent-ils ? Il est présumable qu’elle reconnut devoir au grand rebouteur une fière chandelle.

— C’est égal, dut-elle avouer ; sans vous, je passais un mauvais quart d’heure. Que je vous suis reconnaissante de votre généreuse intervention !

— Madame, ce n’est pas parce qu’on a été élevé dans la charpente qu’on manque de galanterie à l’égard du beau sexe.

— Je m’en suis aperçue. Tudieu ! Comme vous leur avez rivé leur clou !

— Je n’aime pas que l’on fasse le fin renard avec moi. J’ai de la malice à leur en revendre. Ils ont voulu me mettre dans l’embarras à votre propos. Avec ça que je condamnerai jamais une jolie femme coupable d’amour, moi qui ai dit : « Il vous sera beaucoup pardonné parce que vous avez beaucoup aimé ! »

— Alors, vous me conseillez ?…

— Je vous conseille de vous rabibocher avec votre mari et de mettre toute votre intention à ne plus faire d’accrocs à votre chasteté conjugale. Vous comprenez que, si vous vous laissez encore pincer, je ne serai pas toujours là pour vous défendre.

— C’est vrai. Mais si mon mari ne veut plus me recevoir ?

— Soyez sans inquiétude. Dans ce cas, venez me trouver ; je vous donnerai une lettre de recommandation pour plusieurs dames de mes amies qui demeurent à Magdala et à Tibériade et qui vous accueilliront dans un certain petit cénacle de saintes femmes que j’ai par là-bas. Il y a des péchés bien plus gros que celui que vous avez commis. Le plus gros péché, c’est de ne pas croire en moi.

— Seigneur, je crois en vous.

— Merci.

— Suis-je complètement pardonnée ?

— Comment donc !… Pensez souvent à moi ; je vous promets, de mon côté, de penser souvent à vous… Nous sommes appelés peut-être à nous rencontrer encore : il y a des hasards si bizarres dans la vie.

— Seigneur, ma pensée ne vous quittera pas.

— Tant-mieux. Vous serez sûre, comme cela, d’aller en paradis.

— Qu’est-ce que le paradis ?

— C’est un lieu de délices où je comble de toutes les joies désirables ceux et celles qui m’aiment.

— Je veux y aller alors.