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LA VIE DE JÉSUS

une blague… Il est dieu, j’en mettrais ma main au feu ; du reste, il me l’a bien prouvé.

— Comment ça ?

— Tu es trop curieux, Lazare… Qu’il te suffise de savoir que je suis la femme privilégiée de la nouvelle religion que Jésus est en train de fonder, que je suis la première à qui aient été révélés les saints mystères… Contente-toi de ma parole, et retiens bien ceci : ce Jésus que tu débinais tout à l’heure, c’est le Messie promis par les prophètes, c’est l’agneau divin qui rachètera les humains du péché d’Adam et d’Ève, c’est le Christ qui à la fin du monde viendra juger les vivants et les morts.

Elle avait débité cela avec un enthousiasme comme seule peut en produire la foi.

Lazare cependant hésitait encore.

— Es-tu bien sûre, au moins, de ce que tu avances ? demanda-t-il. Si cela était vrai, ce serait très grave !

— Je t’en donne ma parole de déshonneur !

— Alors, c’est vrai.

C’en était fait. Lazare et Marthe étaient convertis au fils du pigeon. La Magdeleine triomphait.

— Vous voyez, disait-elle, que j’ai raison de me considérer comme éminemment favorisée… Maîtresse en titre de Dieu, quelle gloire !

Et elle se rengorgeait.

Marthe était de son naturel curieuse, comme la généralité des femmes. Elle demanda à Magdeleine :

— Y aurait-il moyen de le voir, monsieur Dieu ?

— Vrai, tu désirerais faire sa connaissance ?

— Tout de même, oui.

— Moi aussi, ajouta Lazare.

— Dans ce cas, je vais le chercher ; il est venu avec moi à Béthanie… Vous allez voir comme il est beau, mon divin maître… Il n’y a pas un officier de Magdala qui le vaille… Vous m’en donnerez des nouvelles… Seulement, pour ce qui concerne la révélation que je vous ai faite, chut ! ayez l’air de ne rien savoir.

Là-dessus, elle partit. Marthe était rêveuse.

Une heure après, la Magdeleine revint, accompagnée de Jésus, qu’elle présenta à son frère et à sa sœur.

— Elle le voit avec les yeux du cœur, pensait Lazare ; il n’est pas beau du tout. Maintenant, puisqu’il est dieu, c’est tout de même une veine pour elle qu’il soit son amant.

La réception se passa sans cérémonie. Jésus parla, et il eut vite conquis deux nouvelles recrues ; la Magdeleine, il est vrai, avait bien préparé le terrain.

Lazare retint le Verbe à déjeuner ; il accepta. Marthe se mit en devoir de préparer le repas. Tout en vaquant aux soins du service, en veillant à ce que rien ne manquât, elle reluquait le Nazaréen du coin de l’œil, et, à elle aussi, il parut très beau.