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LA VIE DE JÉSUS

pas le secourir dans sa maladie, on verra tout à l’heure pourquoi.

Durant deux jours, il eut l’air d’oublier totalement le message des deux sœurs. Pendant ce temps, Lazare tourna de l’œil. Voilà Marthe et Marie au désespoir. On empoigne mon trépassé, on le lave avec des essences, on le ficelle solidement au moyen de bandelettes parfumées, on commande les billets de faire part.

Comme Lazare occupait une haute position parmi les Juifs, on lui fit un enterrement de première classe. Il y eut beaucoup de monde à ses obsèques. On le mit dans une superbe grotte funéraire, qui était le caveau de la famille. Pendant trois jours, on se livra à des lamentations réglées au tarif le plus élevé ; Magdeleine avait décidé que, sur le chapitre des larmes, on ne regarderait pas à la dépense ; il y eut donc des pleurs bien conditionnés.

Marthe et Marie, elles-mêmes, se joignirent au chœur des pleureuses et versèrent consciencieusement de vrais déluges de sanglots. Il est vrai qu’elles étaient sincères, aimant leur frère à l’adoration.

La Magdeleine, surtout, cherchait à ne pas croire à ce trépas si brusque.

Ce cher Lazare ! s’écriait-elle ; il y a huit jours, il était solide comme un château-fort, et le voilà aujourd’hui dans la tombe… Non, il n’est pas possible qu’il soit mort !

Et elle exigea que l’on rouvrît le tombeau. On découvrit le visage de Lazare. Il était tout ce qu’on pouvait souhaiter de plus défunt. On replaça la pierre à l’entrée du tombeau ; on la scella définitivement. Les amis de la famille avaient bien constaté que le frère de Marthe et Marie n’avait pas volé ses funérailles.

Mais, au moment précis où Lazare passa l’arme à gauche, Jésus, à qui rien ne peut être caché, reçut, par son père le pigeon, sans doute, communication de l’événement. Il dit tout à coup à ses disciples :

— Retournons en Judée.

— En Judée ! clamèrent les autres ; mais vous n’y pensez pas ?… Vous venez à peine d’échapper à la colère de vos ennemis, et vous voulez retourner à Jérusalem !… Allons donc !… Auriez-vous déjà oublié que vous avez failli être lapidé !… Saperlotte ! c’est alors que vous avez la mémoire courte !

— N’importe, repartit Jésus. Allons en Judée, sinon à Jérusalem, du moins à Béthanie.

— La Magdeleine vous manque, hein ? dit familièrement un apôtre, qui croyait avoir deviné le motif de cette envie subite d’un retour en Judée.

— Non, mon ami. Il n’est pas question de la Magdeleine dans mon esprit. Je pense à mon frère Lazare qui dort, et je désirerais bien aller le réveiller de son sommeil.