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Page:Léo Taxil - La Vie de Jésus.djvu/285

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LA VIE DE JÉSUS

pourritures », « avaleurs de chameaux », et « engeance de vipères » ; enfin, il déclara qu’ils étaient « responsables de tout le sang innocent versé sur terre, depuis Abel le Juste jusqu’à Zacharie, fils de Barachie. »

Accuser quelqu’un du meurtre de Zacharie était, chez les Juifs, la plus grande de toutes les injures. C’était comme si, chez nous, on appelait Dumollard un placeur de bonnes. L’assassinat de Zacharie était regardé par les Israélites comme le crime qui avait le plus irrité Jéhovah et appesanti sa main sur Jérusalem. Bien qu’il remontât à plus d’un siècle, on accusait d’y avoir pris part les gens à qui l’on voulait être désagréable.

Ce Zacharie était un sacrificateur qui avait été massacré par ses collègues entre le temple et l’autel. Or, le sang, ainsi répandu sur les dalles, ne cessait de bouillonner ; rien ne pouvait l’effacer. Quand le roi Nabuchodonosor entra dans le Temple, il trouva étrange ce bouillonnement. Il voulut apaiser le sang de Zacharie en lui offrant une vengeance : il amena en ce lieu les rabbis et les égorgea ; le sang bouillonnait toujours. Il saisit des enfants qui sortaient de l’école et les immola au même lieu ; le sang ne s’apaisa pas. Il fit venir de jeunes prêtres, les massacra ; et le sang continuait de bouillonner. Près de cent mille victimes succombèrent, sans le fléchir. Alors, Nabuchodonosor s’approchant : « Zacharie, Zacharie, dit-il, tu as détruit la fleur de ton peuple, veux-tu que je l’anéantisse entièrement ? » À ces mots, le sang cessa de bouillonner.

Telle était la légende de Zacharie ; on voit que rendre quelqu’un responsable de ce sang-là n’était pas lui adresser une mince insulte. Aussi, les pharisiens qui avaient si souvent pris des résolutions contre Jésus, résolurent-ils cette fois de les exécuter.

Pendant qu’ils conspiraient contre lui, le Verbe se promena un peu par le Temple avec ses apôtres, pour voir où en étaient les travaux. Près d’une terrasse, se trouvaient des troncs disposés pour recevoir les aumônes des fidèles. On sait que de nos jours c’est absolument la même chose dans les églises : tronc pour la chapelle de la Vierge, tronc pour les âmes du purgatoire, tronc pour l’entretien du culte, tronc pour l’œuvre des séminaires, tronc pour le denier de saint Pierre, tronc pour les petits Chinois ; l’énumération n’en finirait plus. Au Temple de Jérusalem, ces troncs étaient au nombre de treize, tous ouvrant des gueules béantes où les fidèles bien calés jetaient avec ostentation de grandes pièces d’argent. Survint une pauvre femme toute honteuse qui déposa à son tour deux minuscules pièces de cuivre de la valeur d’un quart d’as, dit l’Évangile ; or, l’as valait cinq centimes de notre monnaie.

— Vous avez vu cette pauvre femme ? demanda Jésus aux apôtres.

— Oui, maître.

— Eh bien, elle a donné plus que tous les autres riches ; eux