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LA VIE DE JÉSUS

CHAPITRE LXIII

DE PILATE À HÉRODE, ET RÉCIPROQUEMENT

— Gardes, en avant ! au palais du gouverneur ![1] commanda le capitaine.

On se mit en marche pour se rendre au prétoire de Ponce-Pilate. Les prêtres étaient appelés au Temple par le sacrifice du matin ; le reste des assistants forma autour de Jésus un long cortège qui, en traversant la ville, se grossit au fur et à mesure de tous les curieux.

Les habitants commençaient à se lever et à se rendre à leur travail.

Les marchands de carottes et de choux-fleurs, les ramoneurs, les vendeuses de mouron pour les petits oiseaux, les fruitières qui allaient au marché, les laitiers qui transportaient leurs boîtes-au-lait, les épiciers qui ouvraient leur boutique, tout Jérusalem en un mot abandonna ses occupations et accompagna le prisonnier au palais du gouverneur ; tous étaient avides de suivre les diverses péripéties de l’événement.

Jésus fut introduit dans une des salles. On l’y laissa seul, un moment, tout en gardant les portes. Pilate se rendit auprès de lui. Lié et piteux comme il était, le fils du pigeon n’avait pas alors l’air dangereux, et Pilate, qui était un bon diable de procurateur, en eut pitié. Il avait entendu parler des prédications de l’individu, de ses excitations à la révolte contre la domination romaine ; mais il n’avait désiré sévir que lorsqu’un soulèvement se serait produit.

Il considéra donc quelques instants l’ex-charpentier et vint ensuite demander aux Juifs :

— Quelle accusation portez-vous contre cet homme que vous avez amené dans mon prétoire ?

Alors la litanie des griefs des Israélites commença :

— C’est un imposteur !

— Un homme de mauvaise vie !

  1. J’ai employé ici le terme dont se sert l’Évangile pour qualifier Pilate, mais ce titre de gouverneur que lui donne Matthieu est une preuve de la fausseté du document évangélique, fabriqué au deuxième siècle par un ignorant. En effet, Pontius Pilatus, administrateur romain, n’a jamais été gouverneur, mais seulement procurateur, c’est-à dire intendant de la Judée pour le recouvrement des impôts réservés au César, avec le droit de veto dans le cas de condamnation capitale prononcée par les tribunaux du pays. Le procurateur Pilate, successeur du procurateur Valerius Gratus, était sous la dépendance du gouverneur de Syrie, Lucius Vitellius, qui seul portait alors le titre de gouverneur et ne résidait pas à Jérusalem.