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LA VIE DE JÉSUS

à Hérode, ils lui traduisirent un passage du prophète Michée, où il était dit :

« Et toi, petite ville de Bethléem-Ephrata, tu es une des plus minuscules dans le territoire de Juda, et pourtant de toi sortira un prince qui paîtra le peuple d’Israël ramené par lui à Dieu. »

Quand et comment devait naître ce prince ? — La prophétie de Michée n’en disait rien.

Dans l’espèce, pour ne pas contredire Hérode, les docteurs juifs opinèrent qu’il pouvait bien y avoir une coïncidence entre cette prédiction passablement vague, et les calculs algébriques des rois-mages.

— Bon, se dit Hérode, j’ouvrirai l’œil sur Bethléem.

Et il congédia les prêtres du Temple, sans leur faire part des sinistres projets qu’il méditait ; car il méditait des projets sinistres.

Parmi ces membres du clergé israélite, un cependant aurait pu renseigner Hérode d’une façon très claire. C’était le grand-prêtre Siméon, qui avait présidé à la purification de Marie et à la présentation de Jésus au Temple : Siméon, on ne l’a pas oublié, avait reçu l’inspiration de Jéhovah, et il avait reconnu le Messie du premier coup d’œil. Il est plus que probable qu’il faisait partie de la réunion des princes des prêtres au palais du tétrarque. Pourquoi ne donna-t-il aucun renseignement sur ce qu’il savait ? Sans doute, Jéhovah qui, le 2 février, l’avait rendu si loquace, cette fois lui ferma la bouche.

Hérode résolut donc d’attendre le retour des mages.

Mais les mages, obéissant à une voix nocturne, s’abstinrent de repasser par Jérusalem.

D’où il résulta que le roi Hérode, s’agaçant de plus en plus, finit par avoir une terrible crise de nerfs. Il entra dans une fureur inénarrable, cassa toute sa vaisselle, gifla tous ses domestiques, tourna le dos chaque soir à sa femme, s’arracha de nombreux cheveux et se foula même le poignet en voulant s’administrer un coup de poing dans une glace.

Il se rendit à Bethléem, accompagné de l’exécuteur des hautes-œuvres et de ses aides ; là, il fit comparaître par devant lui les notables habitants du village.

— Est-ce que trois rois de l’extrême Orient ne sont pas venus tout récemment ici ? leur demanda-t-il.

— Parfaitement, sire. Trois rois, montés sur des chameaux superbes, suivaient une étoile et se sont rendus à une écurie.

— À une écurie ?

— Oui, sire, à une écurie où un vieux bonhomme et sa femme, fraîchement accouchée, avaient pris gîte.

— Êtes-vous bien sûrs de cela ?

— Dame ! sire, notre village ne compte pas trois mille habitants, répondirent les notables. Nous nous connaissons tous ici, et vous pensez bien que l’arrivée d’une caravane de trois rois n’a pas pu passer inaperçue. Ce n’a pas été un mince étonnement