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LA VIE DE JÉSUS

« Quand les jours de la fête furent passés, lorsqu’ils s’en retournèrent, l’enfant Jésus resta dans Jérusalem sans que son père ni sa mère s’en aperçussent, et ils marchèrent ainsi durant un jour ; et pensant qu’il était avec quelqu’un de ceux de leur compagnie, ils le cherchèrent parmi leurs parents et parmi ceux de leur connaissance ; mais, ne l’ayant point trouvé, ils retournèrent à Jérusalem pour l’y chercher. » (Luc, chap. ii, versets 43, 44 et 45.)

— Diable ! diable ! faisait Joseph, te rappelles-tu, Marie, si l’enfant était avec nous quand nous sommes sortis de chez le veau à six têtes ?

— Je n’en suis pas bien sûre, mais il me semble que oui.

— Oui, en effet, c’est cela ; à ce moment, Jésus était encore avec nous, puisque c’est précisément en sortant de chez le veau à six têtes que nous avons acheté des gaufres à l’enfant… Bon ! je vois maintenant où nous l’avons perdu…

— Où ça ?

— Chez la belle Bérénice, la femme-poisson.

— Mais non !

— Mais si !

— À propos de Messie, je crois plutôt qu’il est resté à la ménagerie des chiens savants… Te rappelles-tu, Joseph, comme cela l’intéressait, l’exercice de l’épagneul qui marchait sur une boule ?

— Tu as peut-être raison… Allons demander à la municipalité ce que sont devenus les montreurs de chiens savants.

— Pourvu que ces maudits saltimbanques n’aient pas emmené notre petit Jésus avec eux, gémissait Marie. Je ne veux pas qu’ils fassent de mon enfant un danseur de corde !…

— Calme-toi, ma femme, calme-toi, répondait Joseph ; nous le retrouverons : bien sûr, il est à l’hôtel de ville, chez le concierge, avec les clefs perdues.

Ils allèrent donc partout, d’abord chez les autorités, ensuite dans les établissements publics ; pas plus de Jésus que dans ma poche !

Joseph perdait la tête : il ne pouvait pas croire au malheur qui lui était survenu ; il se frappait la poitrine à coups redoublés et s’accusait, non sans quelque raison, de négligence. Il lui semblait à tout instant qu’il se trouvait au jugement dernier et qu’il entendait le père Éternel lui crier d’une voix tonnante :

— Arrive ici, Joseph !… Plus près, sacripant, afin que je te pulvérise !… Vieux propre à rien, je t’avais confié mon fils, ou plutôt celui du pigeon, afin que tu l’eusses en bonne garde ; ce fils était un Messie qui devait obtenir la grande croix de sauvetage pour avoir repêché le genre humain noyé dans le péché… Je comptais sur toi comme j’eusse compté sur moi-même, si mes fonctions m’avaient laissé le temps de venir sur terre élever le divin moutard… Et voilà que le morveux n’a pas eu plutôt douze ans que tu t’es empressé d’avoir la bêtise d’aller le per-