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Page:Léo Taxil - La Vie de Jésus.djvu/61

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LA VIE DE JÉSUS

d’un magnifique lis. Ce lis en disait plus que bien des commentaires. — Nous avions négligé de relater cette aventure, et nous en demandons bien pardon aux lecteurs ; mais il n’est jamais trop tard pour dire de belles choses.

Enfin, si Joseph avait eu des enfants d’un premier mariage, nous les aurions vu figurer à Bethléem pour le recensement, et, en outre, Joseph les aurait aussi trimballés en Égypte.

Par conséquent, rengainez votre interprétation, excellent saint Épiphane : qui veut trop prouver ne prouve rien.

Il est tout naturel d’admettre que Jésus fût l’aîné de ses frères et sœurs, que ceux-ci naquirent vers l’époque de son retour d’Égypte, et que le Christ fut, avec et après Joseph, le gagne-pain de toute la famille.

Quand il fut parvenu à l’âge de trente ans, deux de ses frères devaient entrer dans leur majorité, et Jésus, pensant alors que les siens pouvaient désormais se passer de lui, se décida à entreprendre ses prédications.

Au premier moment, lorsque l’Oint manifesta ses intentions de verbiage, ce fut à qui se ficherait de lui dans sa famille ; on haussait les épaules, quand il annonçait qu’il allait remuer le monde au seul bruit de sa voix.

Ses frères, ses parents, ses amis s’abordaient tristement et se tenaient des conversations dans le goût de celle-ci :

— Eh bien, et Jésus, que devient-il ?

— Je l’ai vu hier. Il a toujours sa marotte…

— Ça ne lui passe donc pas ?

— Hélas, non !

— Quoi, il persiste à vouloir convertir le genre humain ?

— Plus que jamais !

— Je vous plains sincèrement et je plains surtout sa mère. Cette brave femme ne méritait pas cela.

— Que voulez-vous ? il faut en prendre son parti. Jésus a la cervelle détraquée, et il est têtu comme un mulet rouge. Il veut prêcher, il prêchera…

— Ah ! il va raconter de jolies choses !…

— Je ne sais pas ce qu’il débitera aux badauds ; mais, à coup sûr, ce n’est pas nous, ses frères, qui irons l’entendre. Il nous a déjà rebattu les oreilles d’un tas de sornettes de l’autre monde : c’est à vous rendre idiot en vingt-quatre heures. Aussi, quand ça lui prend, nous nous sauvons au plus vite…

— Triste, triste ; je vois qu’il a complètement perdu la boule.

— C’est comme vous le dites.

— Quel malheur pour votre famille ! Ce garçon-là finira mal…

Et là-dessus, parents et amis se séparaient en secouant lamentablement la tête.

Vous croyez que j’exagère ?

Lisez l’évangile de saint Jean (chap. VII. vers. 5) : « Ses frères eux-mêmes ne croyaient point en lui. »