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LES TROIS COCUS


CHAPITRE XVI

UN COLLECTIVISTE RÉCALCITRANT


Or çà, le soir de la métamorphose réciproque du pompier et du vicaire, le commissaire de police du quartier du Louvre avait eu sur les bras une affaire bien autrement curieuse que celle qui allait échoir le lendemain à son collègue de la Sorbonne.

Notre marseillais Pharamond Le Crêpu, le cordonnier poète, s’était établi, avons-nous dit, à Clichy-la-Garenne. Là, il professait hautement ses opinions collectivistes ; car, à ce moment-là, il n’était pas encore anarchiste. Cela devait venir, mais plus tard.

Pour le quart d’heure, il se contentait de proclamer la collectivité du sol, du sous-sol, etc.

C’est simple comme bonjour, le collectivisme.

« Tout appartient à chacun. »

Ainsi, je suppose que je suis collectiviste. Je vais m’inviter chez mon voisin de palier, je m’assieds à sa tablé et je lui mange un morceau de son omelette. Mon voisin n’a pas à protester ; car il a le droit d’en venir faire autant chez moi.

Seulement, si je suis un malin, je m’arrange pour ne jamais prendre mes repas chez moi et pour déjeuner et dîner sans cesse chez les autres.

Un fabricant de verres fumés pour voir les éclipses de soleil va chez un tailleur. Il se commande un complet, l’essaie et se le fait livrer. Un mois après, le tailleur apporte sa note.

— Qu’est-ce que ça ? dit le fabricant de verres fumés pour éclipses… Une facture… cela n’a aucune utilité !… Un total d’addition !… cela n’a pas le sens commun… Apprenez, monsieur, que dans le collectivisme il n’y a plus de monnaie, et par conséquent, plus de facture ni de chiffres… Nous avons supprimé le capital…

— Mais alors, demande le tailleur interloqué, comment serai-je rémunéré de ma marchandise et de ma peine ?

— Quand il y aura une éclipse de soleil, si vous êtes cu-