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LES TROIS COCUS

— Afin, messieurs, dames et militaires, que vous vous rendiez compte par vous-mêmes de l’effet que peut produire sur des personnes non préparées à la surprise une subite invasion de reptiles, je vais lâcher mes serpents… Allons, Tirelampion, ouvre la cage !

Tirelampion était un des acteurs de la troupe

À peine Athanase avait-il donné l’ordre d’ouvrir la cage aux reptiles, qu’une demi-douzaine de serpents tirent irruption sur la scène en sifflant et agitant leurs têtes plates.

Ce fut un sauve-qui-peut général ; personne ne demanda son reste. Perrimet, riant de bon cœur, en fut quitte pour faire rentrer sa ménagerie, car ses serpents étaient inoffensifs et apprivoisés.

Néanmoins, il ne séjourna pas plus longtemps dans la localité, et, dès le soir même, il pliait bagage.

Grâce à cette anecdote, voilà nos saltimbanques suffisamment présentés au lecteur.

J’aurai tout dit quand j’aurai ajouté que l’autruche de Laripette faisait partie de la troupe depuis seulement six semaines, et que le personnel du théâtre ambulant d’Athanase Perrimet se composait, outre Tatakoukoum et Tirelampion, de trois musiciens, d’un homme-caoutchouc, d’un jongleur indien, d’une jeune danseuse de corde nommée mademoiselle Zodiaque, et de quelques chiens et singes savants.

Dans les grandes occasions, la troupe ne se contentait pas de vulgaires exhibitions Elle jouait aussi le drame, et spécialement la Tour de Neste, remaniée par Athanase Perri met. Le rôle île Marguerite de Bourgogne, transformée en reine négresse, était tenu par Tatakoukoum ; le jongleur indien jouait celui d’Orsini ; l’homme-caoutchouc et Tirelampion devenaient les deux frères d’Aulnay ; mademoiselle Zodiaque était la compagne des débauches de Marguerite.

Quant à Athanase, c’était lui qui se chargeait de Buridan, et pour rendre son personnage encore plus dramatique, à la scène du cachot il avalait des étoupes en feu. Les autres rôles étaient supprimés. Par contre, dans un acte, Perrimet avait introduit un divertissement exécuté par les chiens et les singes, et, à l’orgie de la tour, on voyait apparaître les serpents. Jamais le drame d’Alexandre Dumas ne donna autant le frisson. Le mari de la colosse du Soudan projetait même de mettre en scène l’autruche, pour ajouter à l’œuvre encore plus de relief.

À Luz-Saint-Sauveur, la troupe avait obtenu de grands succès. De là, elle était venue à Argelès. Ensuite, elle