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L’HEREDO.

Il lutta contre eux désespérément, les refoula, se maria, et pendant une douzaine d’années, arracha des malades à la déchéance et à la mort avec une persévérance et une ténacité héroïques. C’était le mythe d’Hercule appliqué à la thérapeutique moderne. On ne compte plus ceux et celles qui lui durent la délivrance et le salut. Car il avait le don souverain du guérisseur. Mais le souci qu’il prenait des autres le détournait de sa propre sauvegarde, si bien que les bacilles recommencèrent leurs incursions, et cette fois triomphèrent de lui. Il n’en avait pas moins mené ce combat victorieux, au dedans comme au dehors de lui-même, durant ce grand laps. Telle est la force du positif, de la faculté de redressement. Mon ami avait dit au mal : « À nous deux ! », et il chassait fièrement tout ce qui amoindrit, et il recherchait tout ce qui exalte, usant de l’altruisme à outrance, ainsi que d’un remède irrésistible. Il me racontait que, même en s’endormant, il s’entraînait encore à vouloir guérir les autres et se guérir. Il ajoutait : « Je hais la maladie, de la même façon que le théologien hait le péché. »

Il n’est rien de plus nuisible que de s’aban-