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L’HEREDO.

plus divers, et en même temps le plus mélodieux de tous nos tragiques, lisez-le à haute voix, en vous rappelant ces quelques notions sur la plasticité héréditaire du moi, et vous distinguerez une vingtaine de personnages, mâles et femelles, pour qui les noms historiques et les costumes antiques ne sont que des déguisements. Ces rois, ces reines, ce Tite, cette Bérénice, cette Phèdre, cette Athalie, cet Hippolyte, ces suivantes, ces confidentes étaient en Racine. Elles étaient intraraciniennes, ces héroïnes terribles ou touchantes, parce que antéraciniennes, parce que transmises à ce poète de génie par les femmes et les hommes de son pedigree. Elles étaient mêlées à son sang et à ses nerfs, trempées dans sa sensibilité, elles faisaient partie de ses penchants, de ses préférences, de ses aspirations vagues. D’où l’impression de vie, l’intense émotion qui se dégagent d’elles. Elles semblent réellement des reviviscences. Les propos amers et doux, divinement cadencés, qu’elles tiennent sont des échos de leur existence terrestre, transmis, à travers plusieurs générations jusqu’à leur traducteur ému et fidèle rencontré, ainsi que, dans les