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L’HEREDO.

dans leur esprit, tandis qu’ils les emploient.

Chacun connaît l’intensité extraordinaire qu’acquièrent certains mots, cependant d’un usage courant, dans les rêves. Mon père citait ainsi le terme « architectural », qui lui était apparu, au cours d’un songe, comme la clé de plusieurs mystères et l’avait empli d’un orgueil surhumain. Chez l’hérédo, les mots suggérés par l’impulsion créatrice du soi, mais colorés et employés par les habitants héréditaires du moi, gagnent ainsi en signification et en puissance. Ils débordent d’expressivité. Ils sont conçus comme lumineux, colorés et sonores autant que comme éléments du langage. Ils prêtent à l’allitération, même au jeu des odeurs et des nuances.

« Les parfums, les couleurs et les sons se répondent. »

En général le verbe, qui indique et spécifie l’acte, relève plutôt du soi, alors que les substantifs et qualificatifs traduisent la variété et les alternatives du moi. C’est ainsi que le style lui-même témoigne des dispositions intérieures et de l’intégrité ou de la dissolution du vouloir. Chez Bossuet, le soi est apparent, nu, brillant et tranchant comme une lame de