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LA VIE ORAGEUSE DE CLEMENCEAU

façon que Philippe Berthelot dut lui composer son topo à la Chambre des Députés.

Le Nonce à Paris était alors un certain Mgr Montagnini, qui avait fait alliance, en vue des élections, des « bonnes élections » — éternel mirage — avec M. Piou, le président du groupe parlementaire de l’Action libérale. M. Piou était lui-même en relations étroites avec Étienne Lamy, directeur de la revue catholique, le Correspondant, rival de la Revue des Deux Mondes. M. Piou était un homme charmant et politiquement imbécile. Des rapports de police fixèrent Clemenceau sur l’activité politique de Monsignor, et l’ordre fut donné de perquisitionner chez lui, de fouiller ses papiers, et de l’emballer pour l’Italie, illico. Brunetière s’était flatté d’amadouer Clemenceau, en lui ouvrant les portes de sa Revue des Deux Mondes et, en sa qualité de « Cardinal vert », ne cessait de chapitrer Sa Sainteté Pie X pour l’amener à obéir au président du Conseil et à accepter les « associations cultuelles ». Celles-ci eussent mis la hiérarchie catholique en pagaille. Un certain Mgr Duchesne, coqueluche des salons parisiens, où il tournait en dérision le grand Pie X et ses encycliques, qualifiées par lui de « Digitus in oculo », menait campagne pour les directives de la République avec deux évêques, Mgr Geay et Mgr le Nordez, ami de François Coppée. Il résultait de tout cela une inexprimable confusion. En fin de compte le Pape eut le dessus, ainsi que Mgr Merry del Val, son remarquable secrétaire d’État, et qui transmettait ses volontés.

Quant à Briand, ignorant comme une carpe et perdu dans ses amours avec une belle comédienne de la Comédie Française, il parlait du Concile de Trente comme d’un conciliabule de trente personnes