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Page:Léon Daudet – La vie orageuse de Clemenceau.djvu/39

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LA VIE ORAGEUSE DE CLEMENCEAU

femme ne subissait pas l’influence d’un « homme noir ». Sa qualité de protestant sauvait Freycinet de cette suspicion, et encore tout juste. Les cléricaux français ne reconnaissaient-ils pas comme chef de conscience un pape romain ! Leur doctrine était, ainsi, à la fois antirévolutionnaire et antinationale. Ils devaient être pourchassés par les lois sans merci. Le salon de Mme Adam avait eu, à ce point de vue, une influence des plus fâcheuses, alors que, sous prétexte de République athénienne, elle recevait, pêle-mêle, les frères ennemis du nouveau régime, issu de la libre volonté du peuple.

Tout en se défendant de pratiquer la mystagogie du père Hugo, lequel habitait l’Olympe, « retiré », Clemenceau était un de ses lévites et croyait, comme lui, au perfectionnement et à l’émancipation de l’homme par la science. Il différait de Rousseau en ceci qu’il estimait, cet humain, à l’état naturel, méprisable et capable, selon les circonstances, des pires bassesses : « On vit entouré de salauds. » Mais ces derniers se recrutaient principalement dans les salons, assemblées, congrès et académies. Bah, il suffisait de leur marcher dessus, la cravache à la main, et aussitôt « ils foutaient le camp comme des volées de perdreaux ».

Quinze ans après l’avènement de la République, et les incendies de la Commune une fois éteints, il semblait convenable et même utile de s’intéresser au sort des ouvriers, les nouveaux parias, de remplacer les œuvres de charité, nids à cléricaux, par des œuvres d’assistance et d’augmenter, pour ce, le budget de l’assistance publique. Le directeur de la Justice connaissait bien, par ses attaches, le monde paysan, monde aristocratique en Vendée, comme en Provence et qui, par l’ascension sociale,