— Ils ont raison de m’en vouloir, dit Clemenceau. J’ai combattu Boulanger, mon œuvre, tant que j’ai pu. Pas par les mêmes moyens que cette canaille de Constans par exemple.
— Moyens de police et parfaitement ignobles. C’est assez drôle qu’avec toute votre perspicacité, vous ne croyiez pas à la police politique. Moi je la connais, je l’ai vue à l’œuvre. Elle a fait là un coup de maître.
— Ce sont de pauvres types, des gens de bureau…
— Mais qui se tiennent, qui sont cohésifs, alors que les hommes politiques passent. Les policiers ont joué leur rôle au quatre septembre. Ils excellent à répandre de faux bruits. Il est bon d’avoir quelqu’un, ou quelques-uns d’entre eux, dans sa manche. Vous n’en avez pas ?
— Certes non. Il me faudrait le ou les surveiller. Quelle fatigue !
— Laissez-moi vous dire que vous avez tort, et que vous vous en repentirez. Car vous voilà vedette, mon cher ami, et les vedettes sont exposées. Aimez-vous Balzac ?
— Je l’admire au plus haut point, bien qu’il soit royaliste et clérical : « J’écris à la lueur de ces deux flambeaux, la monarchie, la religion. » C’est un rude écrivain.
— Eh bien, revoyez ce qu’il dit de la police de son époque, des Corentin, des Coutenson, des Peyrade…
Il y eut un silence, puis Ranc ajouta :
— La Sûreté Générale a joué un très grand rôle dans la Révolution, même avant le Comité de Salut Public. Nous n’avons là-dessus que peu de renseignements, les archives ayant disparu. Peut-être trouverait-on quelque chose dans les dossiers du