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LE MONDE DES IMAGES.

J’ai cru, dans ma jeunesse, comme beaucoup d’autres, à l’évolutionnisme. J’ai vu en lui, quand j’étais étudiant, une des clés de la science. J’ai pu constater ensuite sa puissance d’illusion et comment il interprétait tout, sans rien expliquer ni définir. C’est qu’à cette époque-là, j’étais moi-même sous l’inlluence intellectuelle de tel ancêtre tourangeau ou breton, que je connais bien, et qui ne m’a plus laissé aujourd’hui qu’une singulière aptitude mentale à la compréhension des paysages fréquentés par lui.

En effet, je suis actuellement convaincu que les personimages nous transmettent non seulement des penchants, des aptitudes, des tournures d’esprit, des faiblesses, des tics, des altérations organiques, des mouvements, des traits de visage ou de nature etc…, mais encore une partie de l’ambiance dans, laquelle leurs « réels » avaient vécu. Chacun connaît l’impression de déjà vu que nous procurent certains paysages et certaines circonstances, impression que ne suffit pas à expliquer le terme barbare de paramnésie. Cette reconnaissance mentale est caractérisée à la fois par la soudaineté et par un état de certitude intérieure, accompagné tantôt de contentement euphorique, tantôt de vertige. J’y vois la rencontre d’un site, jadis effectivement hanté et perçu par un ascendant, dont la personimage nous occupe encore, et demeuré adhérent à celle-ci. Les vestiges matériels et pittoresques, transmis héréditairement, sont plus nombreux qu’on ne l’ima-