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Page:Léon Daudet – Le stupide XIXe siècle.djvu/133

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L’ABERRATION ROMANTIQUE

crédit. J’ai eu plusieurs discussions, à ce sujet, avec l’auteur de la France juive ; et quand, après un copieux étalage des arguments fusteliens, je croyais l’avoir convaincu, il reprenait, riant dans sa barbe et tisonnant son feu : « Tout de même, mon ami, le prolétariat actuel continue la servitude de nos pères gaulois. Oh ! cela ne paraît guère niable ! » Il est vrai que peu d’hommes ont eu, au même degré que Drumont, la faculté de ne pas écouter un argument, qui contrariait leur opinion. Il se faisait, lui si sincère, sur un certain point, une certaine erreur conventionnelle, un paysage imaginatif, auquel il se reportait avec plaisir, et dont il ne voulait plus démordre. Cela était, quant à l’invasion germanique et à ses conséquences, d’autant plus surprenant que cette thèse allait au rebours de son mépris, très profond, très réel, pour les révolutionnaires et la Révolution… Nous sommes tous fagotés de diverses pièces, disait Montaigne.

En résumé, toutes les couronnes, tous les lauriers, du XIXe siècle français sont allés, en poésie, à Hugo et, en histoire, à Michelet, représentants éloquents et lyriques de la déraison et de la démesure, dont l’influence sur l’esprit public a été nocive. Au lieu que deux bienfaiteurs de la nation, deux sages de génie, tels que Mistral et Fustel, ont été systématiquement délaissés et tenus à l’écart. À cela, pas d’autre raison que l’infirmité du jugement des contemporains, accompagnée, comme c’est la règle, d’une béate satisfaction de soi. Faites une expérience. Prenez à la Bibliothèque Nationale, une