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Page:Léon Daudet – Le stupide XIXe siècle.djvu/270

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LE STUPIDE XIXe SIÉCLE.

doute, du Stupide, et celle qui le caractérise le plus complètement ; attendu que les insanités antérieures y ont eu leur floraison et leur épanouissement naturels. Ces deux savants se jetèrent avidement sur une doctrine qui flattait leur marotte « Antidieu » (je ne vois pas de définition plus exacte de celle-ci) et construisirent, d’après elle, un fonctionnement de l’esprit humain, comparable à un tableau de sonneries électriques dans une antichambre de banque. À telle faculté, ou partie de faculté, correspondait une zone corticale de l’encéphale. Je vois encore les pains à cacheter, rouges, jaunes, bleus, verts, collés sur les circonvolutions de Sylvius, de Rolando, etc…, signifiant cette attribution tout arbitraire, fondée sur des observations fausses et incomplètes (parce que passionnées) de ces deux maîtres et de leurs élèves.

Quand je dis « passionnée » j’emploie (sans le secours de ma troisième frontale gauche) le mot qui convient. Je n’ai pas connu Broca, dont la frénésie « antidieu » était célèbre et, paraît-il, comique. Mais j’ai connu, avec le professeur Charcot (qui avait, par ailleurs, des parties de génie et une vaste et pittoresque culture), presque toute l’École de la Salpétrière. La plupart de ces médecins, d’une ignorance totale en politique, en métaphysique et en théologie, avaient cependant des opinions bien arrêtées sur la politique, la métaphysique et la théologie… très arrêtées et infiniment puériles et sommaires : celles de leur temps. Ils s’imaginaient commander aux phénomènes, qu’ils interprétaient