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AVANT-PROPOS EN MANIÈRE D’iNTRODUCTION.

Il y a un rythme intérieur, qui préside aux atteintes des émotions comme aux mouvements de la raison. Il est très sensible dans la musique, dans la sonate comme dans la symphonie, et aussi dans le développement psychologique de l’enfant, depuis le moment où il commence à parler, jusqu’à celui où il se met à conjoindre des concepts. Mais aucun siècle, autant que celui qui nous occupe, n’a méconnu l’enfant : sa précoce sagesse et lucidité vers la septième année, sa déviation imaginative ultérieure, vers la douzième année, par l’éveil de l’instinct sexuel. Les théologiens et les psychologues du moyen âge et de la Renaissance ont connu et décrit ce rythme intérieur, duquel dépend toute la logique, la mystérieuse et puissante logique. La Réforme, en réduisant la perspective de l’esprit et sapant la foi, a appauvri et embrouillé ce rythme intérieur, que la Révolution et ses laudateurs et disciples libéraux ont complètement obscurci. La méconnaissance de ce rythme intérieur est un des solides piliers de la bêtise. C’est ce rythme intérieur qui donne, à la parole et aux écrits, leur portée, aux personnalités leur poids et leur ampleur, à la poésie claire, sa force magique. Le génie d’un Ronsard consiste à libérer, à exprimer ce rythme intérieur, et son harmonieuse cadence palpite comme l’âme universelle des choses. De même chez Léonard de Vinci, lequel invente comme il respire, et toujours dans le sens de la beauté.

Le manque de vues générales est un travers commun à bon nombre de savants du XIXe siècle,