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AVANT-PROPOS EN MANIÈRE D’iNTRODUCTION.

naires catholiques, qui sont — dans l’ordre du mouvement — l’honneur de la France à la dérive XIXe siècle, n’auraient pas obtenu un résultat beaucoup plus important, du point de vue spirituel et pratique, en évangélisant leurs compatriotes, à la façon du grand Ozanam par exemple. C’est au fond ce que craignait l’État ploutocratique (car la foi est l’antidote de l’argent) ; d’où les persécutions que l’on sait. Ce domaine sacré n’est pas le mien et je m’interdis d’y pénétrer. Néanmoins, la vie terrestre étant un combat (et plus encore dans le spirituel qu’ailleurs), j’estime qu’il vaut mieux porter un coup au centre et au bulbe qu’à la périphérie et aux annexes. Comment évangéliseront les missionnaires, quand leur recrutement en France sera tari par un État qui tarit tout ?

L’obscurcissement des vues générales tient, selon moi, au remplacement de la croyance, et de l’ambiance de la croyance, par la crédulité. Comparez un sceptique à un sceptique, et le grand nom du XVIe siècle dans cet ordre, qui est Montaigne, au grand nom du XIXe siècle en France, qui est Renan. Quelle richesse, quelle surabondance, chez le premier, et, dans la ligne de discussions ou de remarques, qu’il a finalement choisie, quelle assurance ! Car la façon de discuter de Montaigne s’inspire encore de la scolastique et épuise son sujet avant de conclure, même quand elle conclut qu’elle ne conclut pas. Sur chaque point, Montaigne fait le tour de l’homme, en général, puis de la question rapportée à l’homme, puis des références de la sagesse