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LE STUPIDE XIXe SIÈCLE.

représentation, fort étranger à notre génie national et réaliste, et qui nous a fait tant de mal.

Qu’est-ce, en somme, que le Parlement, Chambre et Sénat, avec ses groupes, ses commissions et son prétendu contrôle ? C’est un immense trompe-l’œil. Je le savais grosso modo, avant d’en faire partie. Mais, depuis que j’en fais partie et que je suis à même de juger les choses de près, je m’étonne qu’une pareille illusion ait duré si longtemps, et j’y vois, une fois de plus, la preuve de la faiblesse de l’esprit public au siècle précédent. Je ne dis pas de la volonté publique, parce que, pour vouloir, il faut concevoir. Le peuple français s’est laissé imposer le parlementarisme par ignorance, et il continue à le subir par inertie. Quant aux députés et sénateurs, lesquels sont censés contrôler les éphémères gouvernements, qui s’éboulent, puis se réédifient pour s’ébouler encore, au sein de l’insanité constitutionnelle, ils s’attachent au système, non seulement en raison des commodités qu’il leur procure, mais aussi en raison du divertissement qu’il leur apporte. Le métier de parlementaire est décevant, mais il n’est pas ennuyeux. À certaines heures, une parole ferme et renseignée peut être écoutée à la tribune et rendre des services. Il serait très faux de s’imaginer que tous les parlementaires soient des ignorants, ou des êtres avides et mal intentionnés. Ils sont, en général, non seulement le résultat d’une élection, mais une sélection. Ce qui est mauvais et nocif, c’est le système, c’est la grande machine dans laquelle ils tournent, débattent et