Aller au contenu

Page:Léon Frapié - La maternelle, 1904.djvu/244

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

défilait, et des clartés, des haleines bénissantes partaient vers les plantes qu’il faut aimer, vers tout ce qui pousse, vers la croissance chérie de tous les êtres, nos amis !…

Une chétive remplaçante d’école maternelle, vous dis-je !

Ah ! l’enseignement, ce que ça vous transforme une femme ! Il y a les obligations professionnelles, le règlement, la hiérarchie, il y a surtout le fanatisme, un dévouement spécial, insatiable, qui mange tous les autres sentiments à son profit.

Je suis allée à l’école de la rue des Druses porter des états d’appointements. Mme Paulin a couru après moi :

— Regardez bien la directrice et la femme de service, je vous dirai quelque chose à votre retour.

Ce quelque chose le voici :

Mlle Doucet, directrice d’école maternelle, emploie sa mère comme femme de service et la convenance professionnelle veut que l’on ignore cette parenté.

Impossible de dire qui est le plus « transformé » : la mère, femme de service, baissant le dos, appelant humblement sa fille « Mademoiselle », ou bien la fille, directrice, appelant sèchement sa mère « Mélanie », et lui commandant rigidement les besognes malpropres.

En conscience, suis-je pas fondée à ressasser mon petit couplet critiqueur ? Ce que le grade vous donne de « l’estomac ! » Ce que la subalternisation vous