Page:Léon Frapié - La maternelle, 1904.djvu/269

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La directrice, non moins pénétrante que moi, l’arrête au passage, et voici Marie entre nous deux. Aussitôt là, sur le couvercle du panier, nous remarquons une large tache roussâtre.

— Où as-tu mal ?

Pas de réponse.

— Tu es tombée ?

Signe négatif.

— Ta maman t’a corrigée ?

Même signe.

— Eh bien, parle, voyons !

Les enfants du préau se taisent un instant par curiosité, et certainement aussi par instinct : quelque chose d’invisible est entré avec Marie Fadette.

Elle ne répond pas et, pendant la courte cessation de surveillance, un gamin mal assis tombe du banc, tout d’une pièce, avec bruit. Sursaut de Marie Fadette en arrière, et une pétrification épouvantée, les yeux désorbités, la bouche béante, vers le camarade un instant étendu.

— Va t’asseoir, dit la directrice soucieuse.

Marie n’était pas placée depuis cinq minutes que deux hommes demandaient Mme la directrice ; chapeaux mous, vestons, grosses moustaches de sergents de ville. Colloque rapide à voix basse, au-dessus de la balustrade.

Madame, pâle à son tour, se retourne vers les enfants :

— Marie ! appelle-t-elle.

Il y a vingt Marie dans le préau. Pourquoi Madame n’a-t-elle pas besoin d’ajouter un nom ?