Page:Léonard de Vinci - Traité élémentaire de la peinture, 1803.djvu/28

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Lorsque Léonard travailloit à ce tableau, le prieur du couvent des Dominicains lui faisoit souvent des plaintes de ce qu’il ne le finissoit point, et il osa même en parler au duc, qui fit venir Léonard, et lui demanda où en étoit son ouvrage. Léonard dit au prince qu’il ne lui restoit plus que deux têtes à faire, celle du Sauveur et celle de Judas ; qu’il ne comptoit point finir celle du Christ, parce qu’il ne croyoit point pouvoir exprimer avec le pinceau les perfections de son humanité ; mais que celle de Judas, il la finiroit bientôt, parce que pour exprimer le caractère de l’avarice, il n’avoit qu’à représenter le prieur des Dominicains, qui récompensoit si mal la peine qu’il prenoit à finir ce tableau.

Cet ouvrage a toujours été regardé comme le plus beau qui soit sorti des mains de Léonard. Le moment qu’il a choisi de l’histoire qu’il a peinte, est celui où Jesus-Christ déclare à ses Apôtres qu’un d’eux le trahira : les sentimens qui durent naître dans l’ame des Apôtres,