cette plaine sans arbres, franchis ces vastes détroits, vogue sur la mer, vogue sur les flots, comme une feuille de nénuphar ! »
Et il ordonna aux fiancés de ramer, tandis que les jeunes filles resteraient inoccupées. Les fiancés ramèrent ; ils ramèrent de toutes leurs forces ; mais le navire n’avança pas.
Il ordonna aux jeunes filles de ramer, tandis que les fiancés resteraient inoccupés. Les jeunes filles ramèrent, leurs doigts craquèrent ; mais le navire n’avança pas.
Il ordonna aux vieillards de ramer, tandis que les jeunes resteraient inoccupés. Les vieillards ramèrent, leurs têtes branlèrent ; mais le navire n’avança pas davantage.
Alors, le forgeron Ilmarinen prit place au banc des rameurs. Soudain, le navire s’agita ; et il glissa rapidement sur les flots, et, de loin, on entendit le bruit des rames battant contre les flancs de la carène.
Ilmarinen redoubla d’énergie ; les bancs du navire craquèrent, ses courbes frissonnèrent ; les avirons en bois de sorbier grincèrent ; leurs manches caquetèrent comme des gelinottes, leurs palettes crièrent comme des coqs de bruyères ; la proue chanta comme un cygne, la poupe croassa comme un corbeau, les supports des rames gloussèrent comme des oies[1].
Le vieux Wäinämöinen tenait le gouvernail d’une main ferme, et dirigeait avec une habileté merveilleuse la course du navire à travers les ondes. Bientôt, un pro-
- ↑ J’ai traduit mot à mot ce passage bizarre, dont je crois devoir citer le texte original :
« Soutavi sorehtelevi,
« Teljot rytkyi, laiat notkui,
« Airot piukki pihlajaiset,
« Airon pyörat pyina vinkui,
« Terät teirina kukerti,
« Nenä joikui joutsenena,
« Perä kaarskui kaaroehena,
« Hangat hanhina havisi. »