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le kalevala

roche, une profonde caverne, avec neuf portes fermées de cent verrous.

Une fissure, une imperceptible crevasse se trouvait au cœur de la roche : Wäinämöinen y enfonça son glaive aigu, sa lame flamboyante, et la roche éclata en deux parties.

Alors, le vieux Wäinämöinen jeta les regards à travers l’ouverture, dans l’intérieur de la caverne, et il y vit des vers, il y vit des serpents qui humaient la bière[1].

Il prit la parole, et il dit : « Les pauvres maîtresses de maison ne recueillent qu’une petite quantité de bière, parce qu’elle est bue par les serpents, détruite par les vers. »

Et il trancha la tête aux reptiles, et il dit : « Jamais plus, durant cette vie et à partir de ce jour, les serpents ne boiront la bière, les vers ne détruiront le malt. »

Et le vieux Wäinämöinen, le runoia éternel, essaya d’enfoncer les portes avec les poings, de briser les verrous avec la puissance de la parole ; mais les portes résistèrent aux efforts des poings, les verrous ne prirent aucun souci de la parole[2].

Le vieux Wäinämöinen, dit : « L’homme sans armes n’est qu’une vieille femme, la hache sans le tranchant est un pauvre outil[3]. » Puis il reprit le chemin de son pays, la tête basse, le cœur triste ; car il n’avait pu encore délivrer la lune et le soleil.

Le joyeux Lemminkäinen lui dit : « Ô vieux Wäinämöinen, pourquoi ne m’as-tu pas pris avec toi comme compagnon d’armes ? Certainement, les portes auraient

  1. La caverne dont il s’agit ici servait, sans doute, de cave où l’on conservait la bière ; les vases qui la renfermaient étaient infectés de vers et de serpents attirés par l’humidité du lieu et le goût de la boisson.
  2. C’est la première fois, depuis le commencement du poëme, que la puissance de la parole se trouve en défaut.
  3. « Akka mies asehitoinna
    « Konna kirves-kuokatoinna. »

    Proverbe finnois.