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Page:Lévi - L’Inde civilisatrice, 1938.djvu/151

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gées vers 150 sur des informations légèrement antérieures, et qui notent : Ozênê, résidence royale de Tiastanês ( Ὀζήνη βασίλειον Τίαστανου). Un feuillet en langue turque ouigoure, exhumée dans le nord du Turkestan chinois au début de ce siècle, nous révèle que ce Caṣṭana est le héros d’une série de contes originaires de l’Inde, mais préservés seulement dans une version chinoise (Wou ming kingAvīdyā sūtra) où le nom du roi était devenu méconnaissable. Le petit-fils de Caṣṭana Rudradāmaṇ, est le souverain d’un vaste empire. Avec lui, l’assimilation hindoue est un fait accompli. Il porte un nom purement hindou, sous le vocable d’une des grandes divinités de l’Inde : Rudra-Çiva (son père s’appelait simplement Jayadāman = la victoire + dāman). Il garde, comme fera toute la dynastie pendant trois siècles de durée, le titre de satrape, ou plutôt de grand satrape (mahākṣatrapa) ; mais il est en même temps un rāja. La famille des Sātakaṇi, qui se pique de représenter les traditions authentiques de la société hindoue, a dû s’allier avec lui par un mariage ; il ne leur en inflige pas moins une défaite sanglante qui leur arrache une part de leurs conquêtes. Il élimine définitivement l’alphabet grec et l’alphabet kharoṣṭhi que Caṣṭana conservait encore. Nous avons une longue inscription, datée de son règne, en l’an 72, soit 150 de l’ère chrétienne, si l’ère des kṣatrapa est l’ère de 78 apr. J.-C. Elle est gravée sur le quartier de roche qui porte une page incomparable des archives de l’Inde, entre les Quatorze Édits d’Açoka et l’inscription de l’empereur Skanda. Et cette inscription même est un chapitre unique de l’histoire hindoue puisqu’elle rappelle des souvenirs précis de la dynastie Maurya, de Candragupta et d’Açoka.