Aller au contenu

Page:Lévi - L’Inde civilisatrice, 1938.djvu/35

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

nombre des siècles. En somme, on se trouve sur le terrain de l’Inde en face du problème que les poèmes d’Homère posent aux hellénistes. Dans les Védas comme chez Homère, on est en présence d’une langue qui, par sa grammaire et son vocabulaire, diffère profondément de la langue classique ; elle conserve un grand nombre de termes et de formes étrangers au reste de la littérature, mais que la grammaire comparative retrouve dispersés dans les provinces les plus variées du territoire indo-européen, témoins expressifs d’un temps où les ancêtres communs des Indo-Iraniens, des Grecs, des Latins, des Celtes, des Germains, des Slaves vivaient en étroit voisinage, sur le site encore incertain de quelque Babel. Mais conclure de l’archaïsme à l’antiquité est périlleux ; des corporations fermées ont pu aisément perpétuer en vue d’usages spéciaux un état suranné du langage. On affirme souvent que la naissance des deux grandes hérésies, Bouddhisme et Jainisme, suppose comme une nécessité l’existence des Védas ; elles supposent l’existence d’un culte et de croyances védiques rien de plus. Tirer des écritures bouddhiques ou jainas une preuve en faveur des textes védiques, c’est aggraver la faute en la redoublant ; à moins d’être un orthodoxe rigoureux, il est difficile d’accepter le canon bouddhique et le canon jaina comme la parole authentique des deux maîtres à qui leur église respective les impute.

On aimerait à savoir au moins par quelle route ces pionniers de l’émigration aryenne sont arrivés à la frontière Nord-Ouest de l’Inde. Il n’est guère douteux qu’ils s’étaient séparés depuis peu de temps de leurs frères iraniens. L’Avesta, dans ses éléments les plus anciens, est pour