Page:Lévi - L’Inde civilisatrice, 1938.djvu/67

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

sanscrit ou en quasi-sanscrit, a disparu ; il en subsiste de vagues traces. Mais les collections du bouddhisme chinois en conservent deux versions datées l’une et l’autre de la dynastie des Tsin Orientaux (317-420) ; et d’autre part l’église de Ceylan en possède une rédaction développée dans son idiome sacré, le pali. L’ouvrage, intitulé : les Questions du roi Milinda, met en présence dans une sorte de tournoi théologique le roi grec et un des grands docteurs du bouddhisme, Nāgasena, qui finit par convertir Milinda. Milinda à cette occasion bâtit un monastère auquel il donne son propre nom. On ne me blâmera pas de citer quelques passages de cet ouvrage vraiment exceptionnel qui oppose dans une savante discussion la dialectique rationaliste du Grec et la foi persuasive de l’Hindou. La donnée, au reste, n’a rien d’anormal. Dès leur premier contact, les deux races qui avaient poussé le plus avant l’analyse des opérations de l’esprit s’étaient plu à s’affronter. Alexandre avait tenu à éprouver par des questions embarrassantes l’adresse des brahmanes à la riposte ; ayant pris dix des gymnosophistes qui avaient conseillé la défection à Sambos, dans sa campagne de l’Indus, il leur avait promis la vie sauve, s’ils savaient se tirer d’affaire. En se montrant clément, Alexandre ne fut que juste. L’Inde s’était affirmée un partenaire digne de la Grèce dans ce duel de la sagesse et de la finesse.

« Quel est le plus fort, de la vie ou de la mort ? — La vie, qui supporte tant de maux. » « Quel est l’animal le plus adroit ? Celui que l’homme ne connaît pas encore. » « Quel est le meilleur moyen de se faire aimer ? — D’être puissant et de ne pas se faire craindre. » Un peu plus tard, c’est