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Page:Lévi - L’Inde civilisatrice, 1938.djvu/72

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l’adhésion d’un converti. Ses monnaies, nombreuses, qui nous font connaître sa physionomie avenante et fine, portent le plus souvent au revers une image de Pallas, comme c’est le cas ordinaire chez les princes qui se réclament d’Euthydème ; la roue, la tête d’éléphant frappées sur ses pièces de bronze carrées, peuvent être cependant des symboles bouddhiques. Le titre ordinairement accolé à son nom est sôtêr, en indien trātāra « sauveur » ; parfois aussi dikaios, indien dhramika « juste ». Ces qualifications sont trop banales pour en rien déduire de personnel. Pourtant il n’est pas douteux qu’il ait donné au bouddhisme des gages sérieux : il avait, à la manière des rois indiens, bâti un couvent qui portait son nom ; le témoignage des Questions de Milinda est confirmé sur ce point par un récit édifiant de provenance indépendante, mis en vers au xie siècle par le Cachemirien Kṣemendra. Enfin la tradition sur le partage de ses cendres, rapportée par Plutarque, reproduit le récit canonique de la répartition des reliques aux funérailles du Bouddha ; que le fait soit authentique, ou qu’il ait été transporté du fondateur de l’église au fondateur du monastère, il n’en atteste pas moins la réputation de sainteté du Grec Ménandre dans la communauté bouddhique.

L’insertion d’un roi grec dans la galerie des Saints du bouddhisme fait pendant, de façon saisissante, à l’insertion du Bouddha parmi les saints de l’Église chrétienne, réalisée quelques siècles plus tard. Elle atteste que la rencontre des deux grandes civilisations de l’Occident et de l’Orient ne fut pas simplement un contact ou une juxtaposition fortuite. Elle provoqua de part et d’autre des