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Page:Lévi - L’Inde civilisatrice, 1938.djvu/9

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I

LES CARACTÈRES GÉNÉRAUX DE LA CIVILISATION INDIENNE

L’Inde est de temps immémorial la terre des prestiges. La littérature des Merveilles de l’Inde s’ouvre dès le ve siècle avant notre ère avec le Grec Ctésias, médecin du roi Artaxerxès et grand amateur d’histoires extraordinaires ; elle se perpétue sans arrêt à travers l’Empire romain et le Moyen-Âge ; elle fleurit chez les Arabes comme chez les Chrétiens. L’imprimerie à peine inventée répand un traité latin de basse époque sur les mœurs des brahmanes qui sort tout droit du roman d’Alexandre et des imaginations du Pseudo-Callisthène, et les successeurs de Louis Jacolliot continuent encore aujourd’hui à entretenir la tradition de vingt-cinq siècles ou davantage. Fakirs ou yogis, magiciens ou prestidigitateurs, saints et voyants, créatures bizarres, à une jambe, ou sans tête, à oreilles gigantesques, animaux monstrueux et jusqu’au règne végétal défilent dans un long cortège à la Barnum, toujours réclamés avec impatience, toujours accueillis avec une inlassable curiosité. L’Inde est condamnée par une sorte de vocation fatale à servir le goût du fantastique qui