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LE NÉPAL


comme un prélude à cette histoire générale de l’Inde qui décourage les meilleures volontés par son étendue, et ses lacunes, mais qu’il serait injuste et fâcheux de négliger : à voir les problèmes que pose et que résout en partie l’étude d’une simple vallée, on devine ce que promet l’étude d’un pays immense, peuplé de deux cents millions d’hommes, berceau d’une civilisation originale, sol d’élection du sentiment religieux, trésor convoité par tous les conquérants. J’ai abordé ma tâche en philologue, par l’examen du passé, des inscriptions, des textes, des manuscrits ; mais j’aurais failli à mon dessein si je n’avais pas poursuivi le passé jusque dans le présent, qui en est le prolongement logique et réel ; la division d’un bloc de temps en époques successives, ancienne, moyenne, moderne, contemporaine, tout arbitraire qu’elle est, peut se justifier en certains cas par des raisons de pratique ou de pédagogie ; sur le domaine indien, où la littérature a par principe esthétique préservé si peu de souvenirs de la vie réelle, le passé isolé du présent reste une énigme indéchiffrable. J’ai dû faire un appel constant aux travaux de mes devanciers ; les noms de Kirkpatrick, de Hamilton, de Hodgson, d’Oldfield, de Wright, de Bendall reviendront presque à chaque page ; mon livre est en grande partie un index méthodique de leurs ouvrages, complété par des connaissances nouvelles et contrôlé dans une faible mesure par mes propres observations. Deux mois passés au Népal en compagnie des pandits indigènes m’ont donné la sensation de la vie locale ; mais je n’ai pas pu entreprendre sur place une enquête approfondie. Admis à visiter le pays comme archéologue, j’aurais abusé de l’hospitalité en sortant du programme convenu, et la faute n’aurait pas même eu pour excuse le profit ; j’ai dit quelles difficultés insurmontables paralysaient la curiosité trop éveillée du voyageur. J’ai tenu à répondre par une loyauté sans réserve à la confiance