il n’est pas actuellement possible qu’elle détourne complètement ses regards de la terre. Il n’y a pas à « rêver pour l’élan mystique une propagation générale immédiate [1] . Notre tâche en est-elle diminuée ? Pas le moins du monde. Nous avons à faire ce qui dépend de nous pour entretenir et propager, dans la modeste mesure de nos forces, le feu sacré, tout en accomplissant notre métier d’homme.
Mais voici une vue profonde qui va relever notre courage ceux qui, dédaignant par ignorance, ou même par hostilité, la vie religieuse contribuent au progrès de la technique utile, se trouvent être des collaborateurs involontaires des grands mystiques pour l’œuvre de la rénovation spirituelle de l’humanité. En effet, cette rénovation ne deviendra possible que si l’activité humaine est libérée, grâce « à un immense système de machines » et à « une organisation politique et sociale » convenable, du souci de la satisfaction des besoins essentiels. On peut en conclure que travailler à l’essor et au perfectionnement d’un machinisme intelligent, c’est hâter la venue de ce jour. En fait la mécanique se retourne contre la mystique ; les prodigieux succès techniques déjà acquis ont suscité un enthousiasme dont les résonances étaient celles d’un défi à Dieu ; on a entendu distinctement les cris de triomphe d’une religion de l’irréligion. Il n’y a pas à s’en inquiéter. « II y a des risques qu’il faut courir une activité d’ordre supérieur, qui a besoin d’une activité plus basse, devra la susciter ou en tout cas la laisser faire, quitte à se défendre, s’il en est besoin ; l’expérience montre que si, de deux tendances contraires mais complémentaires, l’une a grandi au point de vouloir prendre toute la place, l’autre s’en trouvera bien pour peu qu’elle ait su se conserver son tour reviendra, et elle bénéficiera alors de tout ce qui a été fait sans elle, qui n’a même été mené vigoureusement que contre elle [2]. »
Telle nous paraît bien être la situation. Il s’agit de tenir ferme, mais aussi d’être patient et tolérant, mieux que tolérant compréhensif. Ce n’est pas par hasard que des mouvements antireligieux ont agité le monde, qu’une civilisation mécanique s’est développée avec « frénésie ». Si l’on fait avec conscience l’histoire du rationalisme athée et du matérialisme scientifique, il apparaîtra assez
