laissent pourtant le champ libre à deux intréprétations différentes,
voire opposées, quant à la manière dont cette relation s’établit.
L’interprétation de Cuvier, attribuant aux diverses parties de
l’organisme un enchaînement morphologique visant un but, tend à
renaître de ses cendres. Elle s’oppose à l’interprétation transformiste
suivant laquelle se produirait une adaptation des formes aux
conditions d’existence, quel qu’en soit d’ailleurs le mécanisme
influence directe du milieu ou sélection des formes avantageuses.
En réalité, les deux interprétations ne diffèrent pas essentiellement.
Toutes deux dérivent d’un procédé de recherches trop exclusivement
unilatéral, qui consiste à tirer les interprétations de comparaisons
anatomiques. A cet égard, l’influence de Cuvier survit et domine.
Au dire de Cuvier, comparer les divers animaux, de façon à mettre
en relief ressemblances et différences, suffit pour « déduire des conclusions
très remarquables sur la nature et l’usage de chaque
organe, de chaque forme d’oTgane » ; « souvent, ajoute-t-il, un seul
fait d’anatomie comparée détruit un échafaudage entier d’hypothèses
physiologiques 1 ». Cette subordination étroite de la physiologie
à là morphologie découlerait des rapports que soutiennent
les diverses parties d’un organisme. La comparaison d’animaux
divers montre, pour les organes correspondants, des conformations
différentes. Si chacune d’elles s’alliait successivement avec les autres.
des combinaisons multiples existeraient ; en fait, un petit nombre
seulement existe, par ce que les organes ne sont pas simplement
rapprochés, mais concourent à un but commun. Dans ces conditions,
les modifications subies par les uns influent sur les autres : que
les organes aient un rapport immédiat ou paraissent éloignés certaines
s’excluent, d’autres s’appellent.
En conséquence, la disposition anatomique impliquerait le mode de fonctionnement et le dominerait ; les parties seraient liées entre elles de telle manière que le fonctionnement soit assuré dans les meilleures conditions. Connaître une de ces parties reviendrait donc à connaître la plupart des autres, avec leur usage. D’une partie quelconque du canal alimentaire, par exemple, on pourrait déduire le canal tout entier, ainsi que le régime lui-même. Il s’ensuit, logiquement, que la même forme implique la même fonction.
1. G. Cuvier, Anatomie comparée, t. I, p. XVIII.