mais toute la confiance que j’avais ſur
mes graces personnelles, avantage dont
j’avais tant de fois éprouvé le pouvoir
auprès d’autres femmes ; tout cela
m’abandonna dès que je me trouvai vis-à-vis
de Mademoiselle d’Herbeville.
Tant d’attraits, tant de graces, m’interdirent
& me troublerent. Pour aſſurer
ma contenance, je m’approchai d’une
table où l’on jouait. Un penchant involontaire
me ramena bientôt auprès
d’elle. Je lui tins notre langage ordinaire ;
je la trouvais jolie, aimable, &
lui peignais, avec énergie, les ſentimens
que ſa vue m’avait inſpiré…
Ici elle rompit le ſilence qu’elle avait
toujours gardé, pour me dire, avec
un air plein de graces, de majeſté,
& de douceur, qu’elle était bien éloignée
d’ajouter foi à ce que je lui diſais ;
que les vrais ſentimens, les ſeuls dont
on dût faire cas, étaient fondés ſur l’eſtime
& la vertu, & avaient leur ſource
dans la conformité du caractere & de
la façon de penſer ; que n’ayant pas
l’avantage d’être connue de moi, elle
ne pouvait ſe perſuader d’avoir ſi vîte
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L’ÉTOURDI.