Page:L’Étourdi, 1784.djvu/150

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
129
L’ÉTOURDI.

La partie de Madame d’Herbeville finit avant la mienne. Elle ſortit tout de ſuite, & emmena ſon aimable fille. À leur paſſage, je les ſaluai reſpectueuſement, & cette politeſſe ne m’attira de la part de Mademoiſelle Roſe qu’une révérence qu’elle fit ſéchement, & les yeux baiſſés.

Le voyageur que l’éclair a ébloui, ſe ſent moins anéanti par l’horrible fracas du tonnerre qui, ſe briſant en éclats ſur ſa tête, le laiſſe dans la cruelle attente du coup qui doit le réduire en poudre, que je ne le fus par ce départ ſi précipité & ſi peu prévu, & qui dérangea dans un inſtant tous les beaux projets que j’avais enfanté pendant la nuit. J’étais ſi agité que, quoique je gagnaſſe, je mourais d’ennui. Je ne ſoupirais qu’après l’inſtant où je ſerais libre pour me livrer tout entier à mes réflexions, & porter remede à ma douleur. Madame de Becni vint l’y appliquer comme je me diſpoſais à ſortir.

Il y a ſi long-temps qu’on ne vous a vu, Chevalier, me dit-elle, que lorsqu’on vous poſſede, l’on ſe détache

F 5