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L’ÉTOURDI.


cercueils à un prix bien inférieur à celui qu’ils les achetaient, & ces vivans là qui s’enrichiſſent aux dépends des morts, me procurerent une ſomme d’argent preſque égale à celle que j’avais acheté l’étoffe dont j’avais fait faire des capotes ſans couture, comme le peuple les appelle communément.

Mais il y a un terme à tout. Les marchands me refuſerent crédit ; & mes créanciers ennuyés de m’accorder infructueuſement du temps, perſécutés à leur tour, me mirent aux trouſſes toute la légende ſubalterne de la juſtice. Je bataillai tant que je pus ; mais faute de ſecours je fus obligé de tout abandonner, & de me réduire à un point infiniment plus éloigné que celui d’où j’étais parti.

Que de réflexions ne fis-je pas dans cette ſituation critique ; & combien de fois ne maudis-je pas & le luxe & tous les déſagrémens qu’il entraîne. Mais dans de pareils momens, les réflexions ſont plus nuiſibles qu’utiles, & malheureuſement c’eſt ce dont on a une ample proviſion. Cependant comme il fallait