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Page:L’Œuvre du patricien de Venise Giorgio Baffo, 1910.djvu/232

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L’ŒUVRE DE GIORGIO BAFFO

Nous coulons de la sorte des jours heureux,
Puisqu’en versifiant toujours nous chantons.

Par une même route ensemble nous allons,
Mais avec cette différence, que vous mettez
Des frisettes à vos poétiques caprices,
Et que j’écris les miens comme nous parlons.

Votre muse est une Gentilfemme,
La mienne est une gaupe vénitienne
Qui parle franc et va vêtue à la sans-gêne.

Il faut de tout dans la vie humaine ;
La matrone, il est vrai, est nécessaire,
Mais a du bon aussi quelquefois la putain.

AU SUSDIT ABBÉ FRUGONI

Croyant que vous étiez mort à l’improviste,
Puisque je ne vous trouvais en aucun recoin,
J’ai mis des ailes à ma pensée,
Et je suis allé vous chercher en Paradis.

Aux gens qui sont là, le rire sur les lèvres,
J’ai demandé s’ils avaient vu votre museau,
Mais tous autant qu’ils sont, sans plus y songer,
M’ont affirmé que vous n’étiez pas là.

Je suis alors descendu au Purgatoire,
Et ne pouvant non plus vous y trouver,
Au logis du Diable suis allé tout de suite,

Où Pluton me dit : « Regarde par ici ; »