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Page:L’Œuvre du patricien de Venise Giorgio Baffo, 1910.djvu/275

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L’ŒUVRE DE GIORGIO BAFFO

Ne pourraient suffire à si grosse dépense,
Étant toutes pleines de mal Français.

Une putain répondit,
La seule d’entre elles qui fut saine,
Qu’on y gagne encore assez d’argent
Bien qu’à la force du poignet,
Et que qui a envie de jouir
Le plus souvent se fait branler,
De sorte que grâce à ce dire
Le décret en question passa.
Puis prit la parole l’Abbesse
Ou, si l’on veut, la grande prêtresse :
« Il est juste de faire honneur
« À ce cas si bon fouteur ;
« S’il accomplit de bonnes œuvres,
« Le savent bien nos moniches,
« Car pour nous faire la charité
« Il s’est tout consumé.
« Allons petites sœurs,
« Si gracieuses et belles,
« Allons le lever,
« Allons de fleurs le couronner. »

Toutes furent acheter des fleurs,
Et des baumes et des liqueurs
Pour aller l’embaumer
Et de fleurs le couronner.
Les crins épars sur les épaules,
Comme autant de grandes cavales,
Rassemblées toutes en bataillon
Elles allèrent où il était ;
Arrivées auprès du mort,
Elles l’ont tout embaumé
Et de fleurs mêlées de feuilles
Lui ont tressé sa couronne.