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Page:L’Œuvre du patricien de Venise Giorgio Baffo, 1910.djvu/51

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L’ŒUVRE DE GIORGIO BAFFO


LA BEAUTÉ NE SERT À RIEN SANS LA MONICHE

Un jour se pavanait devant son miroir Isabella,
Disant : « Mon amoureux, je l’excuse,
« S’il me veut du bien et me grimpe dessus,
« Car à dire la vérité, je suis belle. »

Survint aussitôt petite sœur, la Moniche,
Qui lui dit : « Tu crois que c’est ta frimousse
« Qui le rend fou d’amour ? C’est mon pertuis,
« J’entends par là mon cher petit bijou.

« Vois, sur l’heure je m’en vais te quitter ;
« Tu verras, quand viendra ton amoureux,
« S’il te regardera plus qu’une fiche-moi le camp. »

De fait, il arriva plein de désirs,
Mais ne trouvant plus ce qui est décousu,
Il lui tourna le cul, tout en colère.
Cet accident curieux
Fait voir que, pour belle que soit la femme,
Elle ne vaut rien, si elle n’a la Moniche.


SUR LA FAMEUSE CLÉMENTINA

Qui est celle-ci, qui danse sur la scène,
La figure couverte d’un voile ?
Pour sûr elle est tombée du ciel,
Car ne peut tant faire créature terrestre.

Regardez, quand elle danse en jeune berger,
S’il est possible de voir chose plus amène ;
Avec tant de bonne grâce, elle tortille du cul,
Qu’elle vous fait sauter l’oiseau un mille au loin.