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AUX ANARCHISTES !

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L’heure nous paraît venue de jeter dans la circulation un organe anarchiste. Peut-être nous trompons-nous.

Rompre tout à coup avec les idées reçues de l’humanité. Ne pas être l’opportuniste qui les suit ni l’idéaliste qui bâtit dans l’île de Salente ou dans le pays de l’utopie ; vouloir se vivre et avoir l’orgueil de vouloir se vivre, non dans des caprices de fou névrosés, mais en se mettant d’accord avec les connaissances scientifiques actuelles, la meilleure hygiène, la meilleure économie : cela peut paraître encore une œuvre prématurée.

Nous ne sommes pas des libertaires, des libérâtes. Un homme a dit : « La liberté de l’homme peut aller jusqu’où va sa puissance, ce qui ne veut pas dire qu’il ait raison de la faire. »

C’est ce que nous pensons.

De tout côté, à tout moment, dans le « milieu révolutionnaire », on entend ces mots : « je suis bien libre. » Libre de vider force verres d’absinthe ou d’alcool, libre de violenter son prochain, libre de travailler dix ou douze heures ou d’abrutir son esprit ; libre d’être fainéant, d’être gendarme ou d’être rentier si on a la puissance ?

Il s’agit de savoir si cette liberté et cette puissance correspondent avec le plus grand développement de l’individualité humaine.

Nous ne voulons pas diminuer la liberté de l’individu puisque nous travaillons au contraire à augmenter sa faculté de puissance, mais nous voulons qu’à tout moment l’homme soit maître de lui, soit de force à envisager la minute présente et les minutes à venir.

Nous considérons que l’homme se considère comme une machine dont il doit retirer le maximum de travail, c’est-à-dire de jouissance. Qu’on le sache bien, le mécanicien qui brûle sa chaudière pour arriver à l’étape fait son dernier voyage.