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Page:L’Arioste - Roland furieux, trad. Reynard, 1880, volume 1.djvu/314

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demandait sans cesse des nouvelles. Soudain il vit un pré couvert d’ombre, entouré d’un fleuve profond qui laissait à peine un petit espace libre d’où l’eau s’écoulait dans une autre direction. Ce lieu ressemblait à celui que le Tibre entoure sous les murs d’Otrîcoli.

Plusieurs chevaliers, couverts de leurs armures, se tenaient à l’endroit par où l’on pouvait entrer. Le païen demanda qui les avait rassemblés là en si grand nombre, et pour quelle cause. Le capitaine, frappé de l’air imposant de Mandricard, et jugeant à ses armes ornées d’or et de pierreries d’une grande valeur, qu’il avait affaire à un chevalier éminent, lui fit cette réponse :

« Nous sommes envoyés par le roi de Grenade, notre maître, pour accompagner sa fille, qu’il a mariée au roi de Sarse, bien que le bruit n’en ait pas encore couru. Quand le soir sera venu, et que la cigale, qui seule se fait entendre à cette heure, se sera tue, nous conduirons la princesse à son père, au camp espagnol. Pour le moment, elle dort. »

Mandricard, qui méprise le monde entier, veut voir si ces gens sauront bien ou mal défendre la dame qu’on leur a donnée à garder. Il dit : « D’après ce que j’ai entendu, celle-ci est belle, et je serais aise de le savoir par moi-même. Conduis-moi vers elle, ou fais-la venir ici, car je suis pressé d’aller ailleurs. »

« Tu es certes un grand fou, » répondit le Grenadin ; mais il n’en dit pas davantage. Le