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Page:L’Arioste - Roland furieux, trad. Reynard, 1880, volume 1.djvu/319

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d’États que moi ? Je le cède en domaines à Dieu seul. Si c’est pour le courage, je crois vous avoir prouvé aujourd’hui que je suis digne d’être aimé aussi pour ma valeur. »

Ces paroles, et beaucoup d’autres qu’Amour dicte à Mandricard, vont doucement consoler le cœur de la donzelle, encore tremblante de peur. Sa crainte se dissipe peu à peu, ainsi que la douleur dont elle avait eu l’âme transpercée. Elle commence à écouter avec plus de patience et de plaisir son nouvel amant.

Puis, par ses réponses de moins en moins farouches, elle se montre affable et courtoise envers lui ; parfois même elle consent à lever sur son visage des yeux qui ne demandent qu’à s’attendrir. Le païen, qui d’autres fois déjà a été féru des flèches d’Amour, non seulement espère, mais a la certitude que la belle dame ne sera pas toujours rebelle à ses désirs.

En cette compagnie, il s’en va content et joyeux, et il voit avec satisfaction, avec plaisir, approcher l’heure où la froide nuit invite tout être animé à prendre du repos. S’apercevant que le soleil est déjà bas et à moitié caché à l’horizon, il commence à chevaucher d’un pas plus rapide, jusqu’à ce qu’enfin il entende résonner les flûtes et les chalumeaux, et qu’il voie la fumée des villas et des chaumières.

C’étaient des habitations de pasteurs, meilleures et plus commodes que belles. Le gardien des troupeaux fit au chevalier et à la donzelle un accueil