Page:L’Arioste - Roland furieux, trad. Reynard, 1880, volume 3.djvu/220

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son adversaire, il l’atteint à un endroit où le coup ne saurait être dangereux.

L’autre manœuvre son épée avec plus de succès, et à plusieurs reprises il engourdit le bras du païen. Il le frappe tantôt aux flancs, tantôt à l’endroit où la cuirasse se relie au casque ; mais partout il rencontre une armure dure comme le diamant, de sorte qu’il ne peut en rompre une seule maille. Cette armure avait été faite par enchantement ; c’est ce qui la rend si forte et si dure.

Sans prendre de repos, tous deux étaient restés un grand moment absorbés par leur combat, et, les yeux fixés l’un sur l’autre, ils n’avaient pas songé à regarder à leurs côtés ; soudain ils furent détournés de leur lutte furieuse par une querelle d’un autre genre. Un grand crépitement d’ailes leur fit retourner à tous deux la tête, et ils virent Bayard en grand péril.

Ils virent Bayard aux prises avec un monstre plus grand que lui, et qui ressemblait à un oiseau. Son bec était long de plus de trois brasses ; le reste de son corps était celui d’une chauve-souris. Ses plumes étaient noires comme de l’encre ; ses serres étaient grandes, aiguës et rapaces. De ses yeux pleins de feu s’échappait un regard féroce. Il avait de grandes ailes qui semblaient deux voiles.

C’était peut-être un oiseau ; mais je ne sais où ni quand il a pu en exister un pareil. Je n’ai jamais vu, ailleurs que chez Turpin, la description d’un animal ainsi fait. Je serais porté à croire que cet oiseau était quelque diable de l’enfer évoqué